Rapport du CESE sur l’intégration continentale : Le Maroc, à la traine, peut mieux faire

Le nouveau rapport du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) sur l’intégration régional du Maroc en Afrique est sans ambiguïté : « Malgré les grands efforts diplomatiques déployés ces dernières années, le Maroc reste faiblement intégré au continent ». Autrement, le royaume doit doubler d’efforts pour son ancrage en Afrique sur le plan économique.
Ce rapport a été présenté en visioconférence conférence a connu la participation et pilotée par le Conseil d’Ahmed Reda Chami, Des institutionnelles, l’OCP, la CGEM et l’ASLEM (Association des Lauréats Etrangers du Maroc, représentée par Son Président LENNAH Toyi) ainsi que d’autres organisations ont pris part à cette téléconférence.
A travers des exemples édifiants, le CESE pointe du doigt les défaillances qui sont à la base de cette faible intégration économique. Dans cette optique, Moncef Ziani, rapporteur du thème au sein du CESE, explique que la part de l’Afrique dans l’ensemble des exportations marocaines est à peine de 3,2 %. Globalement, le niveau des échanges intra-africains est d’à peine 18 %. Un chiffre dérisoire comparé au commerce intra-européen (67 %), entre pays asiatiques (61 %) ou entre les pays d’Amérique du Nord (50 %).
Dans cette optique, le CESE lève le voile sur les freins qui empêchent cette intégration continentale du royaume. En effet, contrairement à l’Afrique du Sud, l’offre du Maroc reste concentrée essentiellement sur quelques produits. En 2018 par exemple, les exportations marocaines vers le reste du continent ont porté essentiellement sur les engrais, les conserves de poissons, les produits d’alimentation et très peu de produits industriels à forte valeur ajoutée (voitures, fils et câbles électriques).
Offres non diversifiées
Il en est de même pour les importations qui sont constituées essentiellement de gaz et de pétrole. Et elles proviennent majoritairement des pays d’Afrique du Nord (l’Algérie principalement, la Tunisie et l’Egypte). D’où la nécessité de diversifier les offres marocaines en directions des autres Etats du continent.
Sur un autre plan, selon le rapport, les investissements directs du Maroc en Afrique et leur nature montrent également que l’on est loin d’une intégration globale. En effet, si ces investissements ont fortement augmenté entre 2013 et 2017, représentant désormais une valeur de 37 milliards de DH, la moitié de ces flux est concentrée sur le secteur bancaire, les télécoms et les assurances. Et l’essentiel des IDE marocains en Afrique sont concentrés sur 6 pays : la Côte d’Ivoire, le Mali, l’Egypte, Maurice (en raison des facilités fiscales), le Gabon et le Cameroun, selon rapporteur.
Dans son avis, le CESE cite les principaux freins à cette intégration. Il s’agit, entre autres, d’une absence d’approche intégrée, une faible intégration des communautés économiques régionales (CER) auxquelles appartient le Maroc, des accords commerciaux qui ne portent pas sur le libre-échange ou encore une zone cible restreinte.
Le CESE pointe également du doigt une offre commerciale insuffisamment diversifiée, une diplomatie économique insuffisamment outillée pour assurer le suivi des accords et des projets d’investissement, des mécanismes de soutien à l’export insuffisants et inadaptés au regard des spécificités du marché africain. Et pour finir le CESE cite la faible intégration dans le transport maritime et routier (absence de compagnie maritime nationale et régionale, faible compétitivité des coûts de transport…).
Des pistes à explorer
Face cette situation, le CESE propose une approche qui s’articule autour de 4 axes majeurs dont le premier vise à ériger en priorité l’intégration régionale du Maroc en Afrique, ceci en concertation entre les secteurs public et privé, tout en créant des mécanismes de concertation régulière entre le ministère chargé des Affaires étrangères et de la Coopération et les représentants du secteur privé.
Il est question également de renforcer les instruments d’intégration aux plans régional et continental et d’apporter de la cohérence et de la complémentarité entre les différents partenariats existants. Le CESE préconise, en particulier, de faire un bilan régulier de l’impact de chaque accord et d’évaluer l’initiative marocaine envers les 33 pays africains les moins avancés (PMA). Enfin, le Conseil propose des actions transversales qui ont trait à la mise en place d’instruments d’accompagnement adaptés en vue d’une meilleure intégration régionale du Maroc en Afrique et ses retombées positives sur les populations. Tout est dit.
Wolondouka SIDIBE
L’intégration vue par l’ASLEM
Pour le Président d’ASLEM, Lennah Toyi, sur invitation du Président du CESE à prendre part à l’atelier de restitution du rapport sur l’intégration régionale du Maroc en Afrique, son institution pourrait constituer un acteur dans ce chantier. « Les Lauréats Etrangers du Maroc, qui sont aujourd’hui les Ambassadeurs du Maroc en Afrique, peuvent constituer une force pour dynamiser l’intégration régionale du Maroc sur le continent », a-t-il dit. Concernant, les freins, il a cité le cas du tourisme. A ce sujet, Toyi a expliqué que les raisons pour lesquelles les Subsahariens ne choisissent pas le Maroc, comme premier destinataire, sont liées notamment aux prix des billets d’avion élevés et disproportionnés par rapport aux compagnies d’Afrique du Sud ou d’Éthiopie sans oublier les procédures d’obtention de visa, complexes et coûteux. Dans ses propositions, il a souhaité que les filiales des entreprises marocaines dans les autres pays en Afrique soient dirigées par des Lauréats étrangers du royaume pour une meilleure intégration efficace. A cet égard, l’ASLEM est disposée à discuter des mécanismes à mettre en œuvre afin que les Lauréats étrangers du Maroc puissent apporter assistance aux opérateurs économiques marocains qui s’intéressent à l’Afrique.